Caprice de la reine

A gauche d'elles est une ferme, dont on a le droit de penser que c'est de là que dépendent ces bêtes et dont on ne distingue les bâtiments que partiellement : d'abord un large pan de mur, solidement coiffé d'un toit d'ardoises et qu'on suppose appartenir aux locaux d'habitation à proprement parler ; ensuite, jouxtant ceux-i, la partie visible d'une autre construction, couverte par ce qu'on doit peut-être appeler de l'Everite et qui est probablement l'annexe, ou l'une des annexes de cette exploitation. Ces édifices, dont on ne peut percevoir que des fragments, sont en effet à peine visibles dans la végétation sur laquelle nous allons revenir. Nous devrons y revenir quoique nous aurions peut-être pu, peut-être dû commencer par elle, nous ne savons pas.

Nous ne le savons pas, pour autant qu'il est difficile dans une description, ou dans un récit comme le fait observer Joseph Conrad dans sa nouvelle intitulée "Un sourire de la fortune", de mettre chaque chose à sa place exacte. C'est qu'on ne peut pas tout dire ni décrire en même temps, n'est-ce pas, il faut bien établir un ordre, instituer des priorités, ce qui ne vas pas sans risque de brouiller le propos : il faudra donc revenir sur la végétation, sur la nature, cadre non moins important que les objets culturels - équipements, bâtiments - que nous essayons d'abord de recenser.

 

Jean Echenoz. "Caprice de la reine" dans Caprice de la reine. Éditions de minuit, 2014.