Beauty revealed

Sarah Goodridge, Beauty revealed, aquarelle sur ivoire, 1828. Metropolitan Museum of Art, New York

Sarah Goodridge, Beauty revealed, aquarelle sur ivoire, 1828. Metropolitan Museum of Art, New York

 

Que se serait-il passé si cette boîte carrée rouge était restée au fond d'un tiroir dans quelque meuble de grenier ? C'est une tout autre image de Sarah Goodridge sans doute que l'on aurait perçue : une vieille fille de Nouvelle-Angleterre, née dans une ferme où elle traçait ses premiers dessins avec un bâton sur le sol en terre battue de la cuisine devenue talentueuse miniaturiste à même de soutenir financièrement sa mère malade et sa nièce orpheline grâce à ses portraits aquarellés sur ivoire de la bonne bourgeoisie de Boston.

Mais il a fallu que la famille de l'homme à qui elle a offert ce trésor  le transmette de génération en génération. Non pas un œil ou même une bouche, comme le voulait la tradition du bijou sentimental, mais de beaux seins blancs légèrement dissymétriques nimbés par une draperie blanche  : une manière de se cacher en ne montrant pas son visage tout en se révélant grâce à l'indice du grain de beauté, détail intime que seul un amant pouvait identifier.  C'est en 1828, peu après le décès de sa femme, qu'elle fit don de cet incroyable auto-portrait à Daniel Webster, politicien qui avait posé pour elle et avec qui elle entretenait une correspondance nourrie.  Hardie démonstration de son désir ou silencieuse demande en mariage ? Nul ne le saura, toujours est-il qu'un an plus tard, il se maria avec une riche jeune femme new-yorkaise. Il continua à la voir, à poser pour elle, à lui écrire des lettres, à détruire celles qu'elle lui envoyait et garda la petite boîte carrée rouge dans ses affaires personnelles jusqu'à sa mort.