white: a project

Elephant folio vierge, collection de la Royal Academy

Coupe à deux anses de Meissen, vers 1715, collection personnelle d'Edmund de Waal

Négatif sur papier ciré d'Horatio Ross,  c. 1850-1860. Fir trees on the bands of Dornoch. Hans P. Kraus Jr, New York.

a mind of winter, Edmund de Waal, 2015, Alan CristeaGallery, London

 

 

 

"White is aura. White is a staging post to look at the world from. White is not neutral; it forces other colours to reveal themselves. It moralises – it is clean when nothing else is clean, it is light when most things are heavy. It is about impossibility. Think of Moby Dick and Captain Ahab, the question crying out, “What is this thing of whiteness?” White is a place to begin and a place to end. "

C'est ainsi que commence la plaquette oblongue que le grand céramiste britannique Edmund de Waal a écrite pour accompagner sa magnifique installation white: a project  au sein de la bibliothèque de la Royal Academy.

Pour y pénétrer, il vous aura fallu vous dépouiller : laisser au vestiaire vos objets personnels. Car white: invite d'abord à une expérience physique : la couleur blanche impose le silence.

Edmund de Waal a regroupé des œuvres que l'on n'a jamais l'habitude de voir ensemble. D'abord dans la salle des gravures : citons une sculpture de Cy Twombly avec un émail peint de la Renaisssance, la palette de porcelaine de Turner avec un netsuke de sa collection privée (objet de son fameux livre Le lièvre aux yeux d'ambre), une partition de John Cage avec une tasse en porcelaine de Meissen, l'une des premières pièces de porcelaine à avoir été fabriquée en Europe, la réplique du buste d'Ippolita Sforza détruit dans les bombardements de Berlin avec sa vitrine noire de pots blancs, a mind of winter. Ensuite, dans les rayonnages de la bibliothèque elle-même, se détachant dans la pénombre studieuse : une nature morte de Morandi, une théière de Malevitch, une stèle anthropomorphique en calcite d'Arabie, une œuvre de Garry Fabian Miller fondée sur la capture de la trace de reflets d'eau à travers un verre coloré sur du papier photosensible. Ces rapprochements opèrent comme autant de variations poétiques autour des émotions esthétiques contrastées que procure le blanc. Un vide, une totalité,  une lumière, une disparation, une infinité, une structure délimitée, un reflet, une absorption, le tout et le rien, le début et la fin.

Et ce sera un choc pour le visiteur de se heurter à la sortie aux foules qui se pressent à l'exposition Ai Weiwei. Il pourra cependant prolonger le rare plaisir qu'il aura ressenti en suivant la White Road  qu'Edmund de Waal a remontée dans son dernier livre.