Raconter une vie

Casa Mollino. (photo issue du site de l'Institut culturel italien de Paris.)

Casa Mollino. (photo issue du site de l'Institut culturel italien de Paris.)

Photo de Pino Musi

Photo de Pino Musi

 

 

Comment raconter une vie ? Comment se défaire de l'ordre chronologique et de la fausse cohérence rétrospective qu'il plaque sur les milliers de possibles activés ou non auquel un individu est confronté tout au long de son existence ? Comment rendre compte des contradictions et bifurcations  ? Comment laisser le mouvement de la vie  prendre le pas sur l'immobilité du mort ?

Ces questions prennent un relief particulier lorsqu'elles s'appliquent à un être comme Carlo Mollino (1905-1968) qui a fait du mouvement l'essence de sa vie. Impossible d'épuiser sa rage de liberté dans l'énumération de ses occupations, fonctions et passions  : ingénieur,  architecte, professeur d'architecture à l’École polytechnique de Turin, concepteur de meubles tout en courbes et asymétrie, défiant l'apesanteur, et de luminaires, photographe, historien de la photographie, journaliste, pilote automobile et inventeur d'une voiture de course, amateur de voltige aérienne, skieur émérite et pionnier de nouvelles techniques de ski alpin , généreux ami fabricant de présents,  célibataire passionné de belles femmes, etc.

Un homme capable de répondre ceci lorsque la revue Domus lui demande en 1942 de décrire sa maison idéale :

"Ainsi, si je le devais, ou avais besoin de me faire construire une maison, je partirais du principe de ne pas déranger  et de laisser mon esprit libre d'imaginer et d'évoluer, tout en tenant compte aussi peu que possible de mon goût actuel, conscient du fait que la sphère platonicienne du travail achevé finit toujours par coïncider avec le goût stylistique actuel. Mais la question est différente, il s'agit de ne pas compromettre la création poétique future - nécessairement différente de l'actuelle - par l'arrogance de l'environnement." "J'ai besoin d'une coque harmonieuse, - très bien - , mais elle ne doit pas inspirer un sentiment définitif et bloqué sur une posture mentale - tel est le défi à résoudre au niveau plastique."

Un homme capable d'utiliser son don extraordinaire pour la visualisation dans l'espace et son ambidextrie à tracer en même temps des deux mains des dessins différents.

Fulvio Ferrari et son fils Napoleone qui le connaissent mieux que personne ont trouvé la parfaite solution : ils se sont refusé à écrire toute biographie de peur de  figer l'existence de Carlo Mollino dans l'encre des caractères d'imprimerie. Au lieu de cela, ils ont choisi de raconter sa vie à la manière des conteurs ambulants. Recevant les visiteurs à la Casa Museo Mollino au numéro 2 de la via Napione à Turin,  ils prennent le temps de déployer de superbes versions contées adaptées à chaque auditoire, jouant de la succession de plans larges et d'effets de zoom sur des détails enchanteurs devant une table basse recouverte de livres de ou sur CM. Dans les interstices de ces récits oraux, ils redonnent toute sa liberté de mouvement à leur héros. Pour eux, sa vie même est une histoire sans fin, toujours à recommencer, chaque nouvelle découverte d'archive reconfigurant ce qu'ils tenaient pour acquis.

Puis, ils vous emmènent visiter les pièces de cet appartement qu'ils ont sauvé d'une irrémédiable destruction  et vous en révèlent l'étonnant secret. Ici Carlo Mollino est toujours vivant.

 

Photo de Pino Musi

Photo de Pino Musi

Le balcon sur le Pô. (photo issue du site All Items Loaded)

Le balcon sur le Pô. (photo issue du site All Items Loaded)

Visites sur rendez-vous

Museo Casa Mollino
Via Napione 2
10124 Torino - I
Tel +39 011 8129868

casamollino@fastwebnet.it